Foo Fighters - Mercredi 6 Juillet 2011 - Palacio de Deportes (Madrid)
« Foo Fighters? Mais qu'est-ce que je fous à "fighter" pour mon espace vital au second rang du Palacio de Deportes, juste derrière Juan Carlos, en première ligne, lui ? Eh bien, justement, je l'accompagne, lui le fan de la bande à Dave Grohl... Ce qu'on ne ferait pas pour les amis ! Bon, j'exagère, je n'ai rien contre Foo Fighters, j'aime même bien le personnage de Dave Grohl, grand batteur, homme a priori très sympathique, et en outre participant occasionnel aux aventures de Josh Homme, ce qui lui fait marquer des points dans mon palmarès personnel. Je n'ai rien contre Foo Fighters, mais ils m'indiffèrent quand même un peu aussi, alors je suis là en touriste, pour voir. Pas le meilleur état d'esprit pour aborder une soirée qui promet d'être longue, c'est vrai...
19 h 45 : Curieusement pour un show de cette taille, la première partie est espagnole. Ils s'appellent Dinero, et moi je leur donnerai bien un peu d'argent pour qu'ils ne jouent pas : non pas qu'ils soient réellement mauvais, au contraire ils sont plutôt compétents et professionnels, mais leur musique, un rock lourd et emphatique, n'a pas un sou d'inspiration, juste des tonnes de transpiration. Bon, ils se démènent sur scène de manière convaincante, il faut leur accorder ça, mais sinon, c'est du rock bas du front, standard, aussitôt écouté, aussitôt oublié. 25 minutes d'ennui, qui me permettent de répondre à mes emails professionnels sur mon BlackBerry !
Quelques minutes plus tard, on a l'explication : il y a une seconde première partie, a priori intéressante cette fois, The Gaslight Anthem... Quand le quatuor du New Jersey attaque son set, il est immédiatement évident pourquoi Springsteen dit tant de bien du groupe : la musique qu'ils jouent, que je qualifierai de « totalement typique de leur origine géographique », ce fameux « Jersey Shore Sound », ressemble à du jeune Springsteen, un peu plus punk rock, dégraissé (ni cuivres ni claviers, seulement deux guitares...) mais vraiment, vraiment similaire. La voix de Brian Falon, excellente (on le remarque particulièrement sur un joli break blues avec quelques mesures de Mannish Boy), mais rappelant celle du boss, augmente l'effet de similitude. The Gaslight Anthem vont jouer 45 minutes, et nous offrir un set punchy, souriant, avec quelques chansons un peu plus accrocheuses. Au final, j'ai quand même l'impression d'un groupe de seconde zone, qui aurait gagné à chercher une voie plus originale. Et puis, les longs discours démagogiques de Falon sur "combien les Foo Fighters sont un groupe extraordinaire" m'ont aussi bien gonflé !
Il est 21 h 30, beaucoup de monde sur scène pour préparer le set des Foo Fighters. Devant, on est un peu plus compressés désormais, mais, comme toujours à Madrid, tout reste très poli. 22 h pile, Dave Grohl, très respectueux de son public, on le sait, entre en scène avec sa bande (trois guitares en tout, avec celle de Dave, dont celle de Pat Smear, qui a œuvré au sein de Nirvana lors des dernières années du groupe), au milieu de jolis effets de lumières dispensés par d’ingénieux mécanismes montant et descendant des cintres, qui font office à la foi de poursuites et d’écrans vidéo rudimentaires. On voit tout de suite qu’on a affaire à un gros show à l’américaine, et qu’on est quand même loin, très loin, du purisme paranoïaque de Nirvana. D’ailleurs, moi qui n’ai, je l’avoue, jamais écouté une seule note de musique de Foo Fighters avant ce concert (non, j’exagère, j’ai écouté une fois This Is A Call voici 16 ans), je vais être surpris par la distance qu’il y a entre le groupe de Grohl et ses origines grunge : quelques réminiscences çà et là du travail de QOTSA (en moins radical), mais sinon, on a affaire à du rock américain sur-vitaminé mais aussi passablement creux, qui consiste surtout à aligner des refrains puissants que tout le monde scande en chœur sur des mélodies assez faiblardes (Grohl prétend aimer la pop traditionnelle, mais il n’a visiblement guère de talent mélodique...), et à délivrer le tout avec énergie et conviction. Ce qui n'est pas si mal, si ce n’était rapidement tellement systématique que ça en devient ennuyeux. Bref, alors que 14.000 personnes sont en pleine hystérie autour de moi, je reste de marbre, en réalisant que, non, cette musique, pour spectaculaire qu’elle soit, n’est vraiment pas pour moi !
Un petit mot donc sur le public du Palacio de Deportes ce soir : relativement jeune, logiquement, très remuant – l’un des plus beaux mosh pits que j’aie vus à Madrid -, et très enthousiaste, ce public va, comme régulièrement en Espagne, littéralement porter le concert, et enchanter ce brave Dave Grohl, qui a décidé d’offrir à Madrid ce soir un concert exceptionnel, pour se racheter de près de 10 ans d’absence. A un moment, un couple un peu dangereux derrière moi va réussir à vraiment foutre la merde, ce qui me rappelle les concerts parisiens ou londoniens, mais il se fera vite évacuer par le service d’ordre... Quelque part, l’Espagnol, rocker ou pas, continue, longtemps après Franco, à faire passer le respect de l’ordre public, social, etc. avant le chaos rock ! Mais bon, ce que j’en dis, moi... !
Le set a démarré sur les chapeaux de roue, et je crains un moment ne pas pouvoir prendre de photos, tant ça tangue et ça chavire autour de moi, mais au bout de 30 minutes, Foo Fighters passent en mode plus calme, avec de longues plages « vides » - solos des uns et des autres, riffs étirés à l’envie, bavardages incessants et interminables de Dave, qui aime visiblement communiquer avec son public : bref, là où j’aurais aimé un concert ramassé, qui capitalise sur l’énergie du groupe, on part pour un marathon interminable, qui durera en fin de compte 2h45, mais avec beaucoup, beaucoup de passages à vide ! Je tue le temps en contemplant Dave Grohl, qui s’est épaissi avec les années, comme tout le monde (quel cou de taureau désormais !) et qui boit littéralement du petit lait en s’amusant avec ses fans : et que je m’avance sur la longue plateforme qui – comme chez les Stones – pénètre loin au centre de la fosse pour lui permettre de maximiser le contact, et que je fais des déclarations d’amour à la musique et à son public. Je relèverai pour mémoire deux commentaires intéressants : l’un relatif à la fabrication du dernier album en date, « Wasting Light », fabriqué d’après Grohl « dans son garage sans utiliser un seul ordinateur, pour être vraiment rock », déclaration de foi qui enchante les fans, mais qui dénote une sorte d’intégrisme obscurantiste assez déplacé, surtout de la part d’un super-groupe qui a visiblement tout le matériel moderne dont il a besoin ; le second, plus touchant, lors du rappel (de 6 titres et 45 minutes !), lorsque Dave joue seul (Times Like These ?)sur sa plateforme : « Il y a 10 ans, j’aurais été terrifié de faire cela, maintenant, j’ai l’impression d’être chez moi ! », ce qui traduit un amour profond de Dave pour ce qu’il fait, un amour qui permet à la musique – je le répète, à mon avis, très, très ordinaire – de Foo Fighters d’avoir un supplément d’âme en « live ».
Au final, alors que le set se termine à une heure moins le quart du matin, qu’est-ce que je retiendrai des morceaux joués ce soir ? Les quelques accents « pop » de Dear Rosemary (extrait du dernier album), Skin and Bones avec son démarrage soul qui tranche avec l’atmosphère « bourrin » qui a prévalu toute la soirée, une reprise / hommage aux p’tits oignons du Young Man Blues de Mose Allison (on se serait cru sur le « Live At Leeds », mais la référence a été visiblement perdue pour la majorité du public, trop jeune sans doute...), et puis quand même This Is A Call en presque conclusion de ce long et généreux concert...
Pas de set list à récupérer, le public, vaguement hagard, s’écoule lentement vers les sorties, et je me dis que, même si j’avais l’air ce soir d’être parmi les plus vieux dans les premiers rangs, j’ai plutôt mieux tenu le coup que la plupart de mes voisins (... qui a plusieurs reprises se sont d’ailleurs préoccupés de mon bien être : gentil, ça !). Juan Carlos, le fan, est heureux, et je le comprends, même si pour moi, Foo Fighters restent un groupe anecdotique, sans réel talent, que je ne retournerai probablement jamais voir sur scène... ».
La setlist du concert de Foo Fighters :
Bridge Burning (Wasting Light – 2011)
Rope (Wasting Light – 2011)
The Pretender (Echoes, Silence, Patience, & Grace – 2007)
My Hero (The Color and the Shape – 1997)
Learn to Fly (There Is Nothing Left to Lose – 1999)
White Limo (Wasting Light – 2011)
Arlandria (Wasting Light – 2011)
Breakout (There Is Nothing Left to Lose – 1999)
Cold Day in the Sun (In Your Honor – 2005)
Long Road to Ruin (Echoes, Silence, Patience, & Grace – 2007)
Stacked Actors (There Is Nothing Left to Lose – 1999)
Walk (Wasting Light – 2011)
Dear Rosemary (Wasting Light – 2011)
Monkey Wrench (The Color and the Shape – 1997)
Let It Die (Echoes, Silence, Patience, & Grace – 2007)
These Days (Wasting Light – 2011)
Generator (There Is Nothing Left to Lose – 1999)
Best of You (In Your Honor – 2005)
Skin and Bones (Five Songs and a Cover – 2005)
All My Life (One By One – 2002)
Encore:
Wheels (Dave acoustic solo)(Greatest Hits – 2009)
Times Like These (half Dave acoustic solo, half with band) (One By One – 2002)
Young Man Blues (Mose Allison cover)
This Is a Call (Foo Fighters – 1995)
Tie Your Mother Down (Queen cover)
Everlong (The Color and the Shape – 1997)