The Go! Team - Jeudi 31 mars 2011 - Joy Eslava (Madrid)
« Tiens, moi aussi ce soir, je me suis trompé de salle ! Et dire que je me moquais de la distraction de Gilles, à qui ce genre de mésaventure arrive de temps en temps... C'est en arrivant avec Inés à 19 h 15 devant une salle Heineken bouclée à double tour qu'un doute m'a saisi : un coup d'oeil rapide aux billets, et nous voilà repartis en trombe à la Joy Eslava, à 15 minutes à pied, où joue ce soir The Go! Team. Pas de conséquences néanmoins à ce petit "retard" additionnel, il y a que deux personnes qui attendent, à une demi-heure seulement de l'ouverture des portes : avec l'arrivée du printemps (il fait très beau, et Madrid a retrouvé son ambiance de fête...), il est clair que le gros du public n'arrivera pas avant 21 heures, heure prévue pour le début du set. Juan Carlos nous rejoint juste à temps pour entrer avec moi... Inés, comme souvent, nous attendra en se baladant.
Une longue attente quand même, dans une Joy Eslava qui ne se remplit que très, très lentement (mais qui finira bondée, ce qui est essentiel pour une musique aussi "festive" que celle du Go! Team) jusqu'à 21 h 30. Etant entrés les premiers, nous nous sommes « idéalement » placés, légèrement sur la gauche, pour être entre Ian Parton, le guitariste-petit pois sauteur fondateur du groupe, au look très « Sonic Youth », et Ninja, la pétulante figure de proue, à l’énergie scénique inouïe. Le sextet de The Go! Team entre donc sur scène avec une demi-heure de retard sur l’horaire prévu, mais il est impossible de leur en vouloir, tant on a l’impression d’être happés par une tornade de joie et de bonne humeur. Autant être franc, je ne me souviens pas avoir jamais vu sur scène un groupe aussi « mobile » : aucun des 6 musiciens n’arrête une seconde de bouger, danser, courir, sauter, gesticuler (si, il y aura une petite pause, un morceau où l’on pourra respirer un petit coup), au point qu’ils feraient presque passer la troupe d’Arcade Fire pour des papys somnolents ! Dans ces conditions, faire des photos qui ne soient pas floues relève de la gageure, mais, honnêtement, on s’en moque un peu, on est là pour s’amuser, non ? Le set démarre – logiquement et littéralement – par T.O.R.N.A.D.O., l’ouverture hip-hop ravageuse de « Rolling Blackouts », et on perçoit tout de suite la différence avec l’album : le son brouillon et confus se transforme sur scène en une tempête impétueuse, la voix de Ninja est magnifiée par son jeu de scène impressionnant (oui, elle est vraiment petite, mais elle est très sexy et a du charme à revendre, un grand sourire perpétuellement affiché sur le visage), et, si ce n’est la légère déception de constater que les cuivres qui propulsent l’album sont reproduits et samplés, et non joués par de « vrais » musiciens, The Go ! Team affiche une maturité musicale et instrumentale qui surprend par rapport à leur image volontairement amplifiée de petits bricoleurs lo-fi ! Et ce d’autant que, on s’en rend compte dès l’enchaînement avec la chanson suivante, Grip Like A Vice, les musiciens changent à chaque morceau de place, d’instrument et de rôle dans le groupe ! Là encore, c’est une pratique qui est devenue assez courante depuis les débuts d’Arcade Fire qui me semblent ont aussi lancé cette mode, mais nul groupe n’a autant systématisé ce changement permanent, qui chez eux traduit plus une philosophie démocratique, très « punk », de la pratique musicale qu’un souhait d’optimiser rationnellement les talents de chacun !
Bon, c’est aussi clair sur scène que sur disque, le gros problème – pour ceux qui le voient comme ça – de The Go! Team, c’est l’impossibilité de cataloguer, classer, étiqueter leur musique, véritablement protéiforme, quelque fois même informe, passant d’une chanson à l’autre, voire au sein même d’une chanson, du rap à la noisy pop, de l’ambient music à la nippon pop, en passant par les BO de veux films de Blaxploitation ! Le tout avec le sourire, en transformant chaque morceau en une mini-célébration hédoniste : d’ailleurs, l’une des banderoles agitées par un fan espagnol du groupe dit : « Souris quand tu te masturbes », ce qui me semble parfaitement approprié au spectacle qui nous est offert. L’heure et quart du concert va donc nous permettre d’osciller entre funk emballé (deux guitares, deux batteries, ça pulse... !) qui fait vraiment monter la pression, et pop suave et électrique, en général chantée par Kaori Tsuchida, la plus « new wave blanche » de la bande, voire par la mini-mini « batteuse » Chi Fukami Taylor. Entre le démarrage pied au plancher et le final explosif de The Power Is On, suivi de Back Like 8 Track (là, The Go! Team en devient presque sidérant, pas si loin de la transe magnifique de nos merveilleux amis de !!!), peu de passages à vide, juste quelques moments moins hystériques, mais pas moins enchanteurs : je réalise – enfin - que Secretary Song ou Ready Go Steady sont de très belles chansons pop, même vêtues de haillons et traînées dans la gadoue comme elles le sont... Dans la salle en liesse, ça bouge presque autant que sur scène, tout le monde pogote, trémousse ou oscille selon le cas, on chante les « la la la » d’usage sur les morceaux quasi –instrumentaux, on répond aux exhortations de Ninja, qui n’a pas sa langue dans la poche pour faire de la retape : Ninja est là pour vanter les charmes de (et au final nous vendre…) « son » album, même qu’à son avis, on devrait chacun en avoir deux exemplaires, au cas où, et aussi en acheter pour nos voisins ! Vers la fin du et, Ninja demande à « l’homme-poulet » de se montrer, et, personne ne se manifestant, se plaint de la couardise de ce fan qui lui a envoyé un mail lui promettant de venir ce soir vêtu d’un costume de poulet, et qui n’a donc pas tenu sa promesse...
Fin des morceaux de la set list au bout d’une courte heure, c’est frustrant, mais on se doute bien qu’en sautant en l’air sans arrêt comme ça, les musiciens ne vont pas tenir deux heures et demi... ! The Go! Team reviendra néanmoins pour trois titres et plus de dix minutes de bonheur supplémentaires, avant de quitter définitivement « Madriiiiiiiiid » comme adore le répéter Ninja en singeant l’accent espagnol. Un roadie m’offre gentiment la setlist, et Juan Carlos et moi – encore tout excités - nous dirigeons tranquillement vers la sortie, pour retrouver Inés qui nous attend dehors pour nous conter ses rencontres nocturnes avec la faune madrilène.
Plus tard, alors que nous retournons dans la fraîcheur de la nuit vers la Plaza de España, nous croisons un... homme-poulet, enfin un type vêtu des pieds à la tête d’un gigantesque costume jaune et orange de poulet, qui se hâte dans la direction opposée ! Coïncidence ? Retard malheureux ? Nous ne le saurons jamais, mais c’est bien là tout le charme de l’histoire. »
Les musiciens de The Go! Team sur scène :
Ian Parton- guitars, harmonica, piano, drums, triangle, glockenspiel.
Sam Dook - guitars, banjo, bass, drums, tambourine
Chi Fukami Taylor - drums, percussion, vocals
Kaori Tsuchida - vocals, electric guitar, keyboards, melodica, glockenspiel, tambourine
Jamie Bell - bass, piano, glockenspiel
Ninja - Vocals, drums, tambourine
La setlist du concert de The Go! Team :
T.O.R.N.A.D.O. (Rolling Blackouts – 2011)
Grip Like A Vice (Proof of Youth – 2007)
Huddle Formation (Thunder Lightning, Strike – 2004)
Voice Yr Choice (Rolling Blackouts – 2011)
Secretary Song (Rolling Blackouts – 2011)
Ladyflash (Thunder Lightning, Strike – 2004)
The Running Range (Rolling Blackouts – 2011)
Ready to Go Steady (Rolling Blackouts – 2011)
Yosemite Theme (Rolling Blackouts – 2011)
Flashlight Fight (Proof of Youth – 2007)
Buy Nothing Day (Rolling Blackouts – 2011)
Bottle Rocket (Thunder Lightning, Strike – 2004)
The Power Is On (Thunder Lightning, Strike – 2004)
Back Like 8 Track (Rolling Blackouts – 2011)
Encore:
Junior Kickstart (Thunder Lightning, Strike – 2004)
Apollo Throwdown (Rolling Blackouts – 2011)
Keys to the City (Proof of Youth – 2007)