David Bowie (avec The Cult et Savuka) - Vendredi 3 Juillet 1987 - Parc de La Courneuve
« C’est presque une gageure pour Johnny Clegg & Savuka, encore à demi-inconnus du grand public français – en tout cas du public de Bowie – d’ouvrir pour ce dernier devant les dizaines de milliers de fans massés à la Courneuve en ce vendredi après-midi torride...
Et pourtant, avec un set concentré, d’une efficacité remarquable, le rocker sud-africain va démontrer que nous avions raison, deux ans plus tôt, de croire qu’il pouvait conquérir le monde. Au bout d’une petite demi-heure, subjugués par des rythmes et des mélodies encore inhabituels pour eux, les spectateurs, après avoir dansé tout leur saoûl, faisaient à Johnny Clegg une véritable ovation ! Cette deuxième rencontre live avec Savuka pour moi, un Savuka par ailleurs renforcé par une choriste impressionnante, prouvait en tout cas que ce n’est pas la simple nostalgie de l’Afrique du Sud qui agit sur moi, mais que le groupe et sa musique sont parfaitement convaincants, même en plein air sur une scène immense, où l’impact des danses tribales est forcément amoindri…
Drôle, très drôle même, le décalage entre The Cult et le public un peu « NRJ » de Bowie en 1987 : du coup, à force de provocations un peu lamentables (Ian Astbury finira par baisser son pantalon et nous montrer ses fesses…) et d’entêtement bestial, il m’est impossible de ne pas accorder ma sympathie à cet infernal groupe de beauf-rock stupide et violent qu’est devenu The Cult ! Car on nage en pleine parodie hystérique des Led Zep et Deep Purple d’autrefois… avec cette réserve quand même que le son est trop fort, trop soufflant pour prêter à rire ! Le mur de Marshall qui crache un son superbe et monstrueux est un bon symbole pour le hard rock du Cult ! Après quelques chansons vaguement laborieuses, le groupe trouve son rythme (ah ! le final speed de Zap City ! Ah ! le refrain bien gras de Rain !) et achève ses (rares) fans avec deux reprises pas honteuses de Born to Wild et de… I Wanna Be Your Dog : à ce stade, je suis déjà hystérique, l’écume aux lèvres, au milieu d’un public stupéfait qui n’en croit ni ses yeux ni surtout ses oreilles…
Nouveau show mégalo pour Bowie, qui, quelque part, mélange tout dans sa tête, et assimile « rock » (…encore ce fameux retour du Rock de ce début 1987 !) et comédie musicale. Scène au décor d’un indicible mauvais goût (une araignée de verre géante, tu parles !) ; usage immodéré de danseurs « modernes » (pour faire Art avec une majuscule) qui, même s’ils ne sont que cinq en fait, fatiguent rapidement le spectateur le plus tolérant avec leurs ballets grotesques ; groupe de requins de studio, trouvant difficilement une unité, rendant tout vaguement chaotique et creux, creux… sans parler du ridicule Peter Frampton, réchappé ( ?) du naufrage des 70’s, avec ses soli étirés et gluants, reléguant le brillant et fidèle lieutenant Alomar au rôle immérité de second couteau… N’oublions pas de mentionner les bruyants intermèdes sonores et dialogués, du genre « urbain », ouaf ouaf ! entre les morceaux… Il faut bien avouer aussi que, dans un style tout-à-fait analogue, Prince avait atteint la perfection quelques semaines plus tôt : en comparaison, Bowie avait un air de has been, d’étoile déchue…
… sauf que, finalement, le charisme époustouflant de l’homme, de ce Bowie toujours jeune à quarante ans et quelques, toujours félin et superbe, suffira à retourner la situation, et transformer le semi-désastre de la première partie du set, incohérente et banalement pénible (oh, le massacre de China Girl ou de All the Madmen !) en un quasi triomphe… A partir de la superbe version de Big Brother, le sommet de la soirée pour les fidèles que nous sommes, le concert semble démarrer enfin, et Bowie retrouve in extremis ses ailes d’ange pour une bonne heure consacrée aux morceaux les plus efficaces du dernier album (assez moyen), « Never Let Me Down » et aux tubes disco (Let’s Dance, Fame, Modern Love), faisant même culminer l’émotion lors d’une interprétation spectaculaire de Time en rappel…
Bilan, après 13 heures passées debout (arrivée à midi à la porte du par cet fin de concert à une heure du matin, sans parler du fait d’être obligé de me pisser dessus pour ne pas perdre ma place au premier rang…) : l’alchimie Bowie fonctionne encore, malgré tous les handicaps qu’il s’impose stupidement, telle une setlist quasiment uniquement consacrée aux chansons des années 80, les plus faibles de son répertoire, et bien sûr, cette mise en scène au goût douteux d’un spectacle disproportionné… Oui, malgré tout cela, l’avenir lui appartient toujours… »
Les photos sont de Jean-Pierre V. - Merci à lui !
La setlist du concert de The Cult :
Wild Flower
Peace Dog
Rain
Memphis Hip Shake
Lil' Devil
I Wanna Be Your Dog (Iggy and The Stooges cover)
King Contrary Man
She Sells Sanctuary
The Phoenix
Love Removal Machine
Born to Be Wild (Mars Bonfire cover)
Les musiciens et danseurs du Glass Spider Tour :
David Bowie - vocals, guitar
Peter Frampton - guitar, vocals
Carlos Alomar - guitar
Carmine Rojas - bass guitar
Alan Childs - drums
Erdal Kizilcay - keyboards, trumpet, congas, violin
Richard Cottle - keyboards, saxophone
Melissa Hurley - dancer
Constance Marie - dancer
Spazz Attack (Craig Allen Rothwell) - dancer
Viktor Manoel - dancer
Stephen Nichols - dancer
La setlist du concert de David Bowie :
Up the Hill Backwards (Scary Monsters – 1980)
Glass Spider (Never Let Me Down – 1987)
Up the Hill Backwards (Reprise) (Scary Monsters – 1980)
Day-In Day-Out (Never Let Me Down – 1987)
Bang Bang (Never Let Me Down – 1987)
Absolute Beginners (Absolute Beginners Soundtrack - 1986)
Loving the Alien (Tonight – 1984)
China Girl (Iggy Pop cover) (Let’s Dance - 1983)
Fashion (Scary Monsters – 1980)
Scary Monsters (And Super Creeps) (Scary Monsters – 1980)
All the Madmen (The Man Who Sold the World – 1970)
Never Let Me Down (Never Let Me Down – 1987)
Big Brother (Diamond Dogs – 1974)
'87 and Cry (Never Let Me Down – 1987)
"Heroes" (“Heroes” – 1977)
Time Will Crawl (Never Let Me Down – 1987)
Beat Of Your Drum (Never Let Me Down – 1987)
Sons of the Silent Age (“Heroes” – 1977)
Dancing With the Big Boys (Tonight – 1984)
Zeroes (Never Let Me Down – 1987)
Let's Dance (Let’s Dance - 1983)
Fame (Young Americans – 1975)
Encore:
Time (Aladdin Sane – 1973)
Blue Jean (Tonight – 1984)
Modern Love (Let’s Dance - 1983)