The Lemon Twigs - Vendredi 31 mars 2017 - Elysée Montmartre (Paris)
« Responsables de l’un des albums les plus passionnants de 2016, les Lemon Twigs attisent la curiosité des foules, et leur second passage à Paris (si je ne m’abuse) a dû être reprogrammé, vu la demande, de la Gaîté Lyrique à l’Elysée Montmartre. Une bonne occasion pour moi de re-découvrir cette salle, que je n’aimais pas particulièrement d’ailleurs du fait d’une sonorisation régulièrement difficile, ré-ouverte depuis quelques mois après plus de cinq ans, suite à un incendie qui l’avait totalement détruite en 2011. Et il faut reconnaître que les propriétaires et architectes ont bien fait les choses : entrée et escalier majestueux, parquet superbe, structure métallique apparente (comme autrefois me semble-t-il…) magnifiée… tout est beau. Petit problème quand même pour les aficionados du premier rang, la scène a été surélevée, ce qui, sans le recul que pourrait offrir les crash barriers, veut dire qu’on doit se tordre le cou pour voir ce qui se passe sur scène (surtout quand on est à moitié nain comme moi…).
19h45 : Lo Moon, trio originaire de L.A. (comme ils nous le diront trois fois) augmenté d’un batteur, nous propose une musique ambitieuse, posée au point d’être un tantinet pontifiante, une musique dont les racines plongent clairement dans l’afterpunk et la new wave des années 80 : quelque part du côté de Simple Minds en (heureusement) moins lyrique, ou, pour ceux qui sont nés au XXIème siècle, comme du Editors radicalement calme. De la musique plus anglaise qu’américaine dans ses origines, donc, surtout avec un chanteur qui croone avec suavité, à la manière d’un Brian Ferry juvénile. Tout cela est bien joué, parfois assez prenant, avec des pics d’intensité bienvenus, puisqu’ils voient les musiciens s’exciter un peu quand même, mais globalement on est dans une morne plaine musicale où toutes les chansons s’enchaînent sur un mid tempo redoutablement similaire. Pas trop grand-chose pour maintenir notre attention éveillée pendant les longues 40 minutes de cette première partie… qui en outre ne bénéficie guère d’un son ou de lumières convenables. Et puis, malgré la sympathie que dégage la jeune bassiste blonde et souriante – qui me remettra d’ailleurs gentiment la setlist à la fin -, il semble y avoir un peu de prétention dans tout cela… une prétention confirmée par les propos du groupe en interview, citant des écrivains (comme Houellebecq !) comme leurs principales influences.
20h50 : Les deux frères D’Addario débarquent, accompagnés par une bassiste et un organiste qui semblent, eux non plus, n’avoir guère dépassé la vingtaine. Contrairement à ce que j’attendais, je ne sais pas pourquoi, c’est Brian, l’aîné, qui est au micro et à la guitare, alors que Michael fait son petit Keith Moon à la batterie derrière : cette référence à Keith Moon qui m’est venue à l’esprit est causée autant par les mimiques outrées et hilarantes de Michael que par son jeu de batterie très dynamique et assez impressionnant. Et je ne parle même pas de sa tenue léopard très… euh… sexy ! Bon, comme me le disait mon voisin avant que le concert ne commence, on craignait forcément que le groupe ne puisse pas assurer sur scène les harmonies vocales délicieuses de l’album, mais on est immédiatement rassurés : le I Wanna Prove To You en intro est aussi beau et irrésistible que sur ”Do Hollywood”, avec en bonus une énergie live très communicative ! Je regarde autour de moi, et je ne vois que des visages souriants, extatiques même, des gens qui chantent ces mélodies lumineuses, qui font de The Lemon Twigs un incroyable nanan, échappant à la malédiction du revival qui frappe tellement de jeunes musiciens à notre époque. C’est bien simple, on est tous instantanément heu-reux, et sur le cul, et aussi heureux d’être ainsi sur le cul !
Devant, le son est tout-à-fait correct, ce qui est important pour profiter du chant (Clément, arrivé tardivement, et donc condamné à rester dans le fond, me dira ensuite que ce n’était pas le cas à l’arrière…). Mais au fur et à mesure que les Lemon Twigs alignent chansons de l’album et nouveaux morceaux, puisqu’un EP est prévu dans quelques semaines et que l’enregistrement du second album devrait commencer dans la foulée, c’est l’énergie très ”seventies” du groupe qui séduit vraiment. Les frérots sont là pour prendre du bon temps, et nous en donner par la même occasion, et cet enthousiasme, cette générosité font vraiment plaisir à voir. Brian se révèle un guitariste assez brillant, d’ailleurs, son frangin se moquant de lui à un moment en le traitant de « Mark Knopfler » ! Une petite remarque quand même : vu de très près, je ne suis pas certain que l’harmonie règne entre les deux frangins, qui se coupent la parole mutuellement non sans une certaine irritation. Brian, plus mûr, et Michael, plus jeune et plus chien fou, connaissent visiblement un genre de conflits classique au sein de toute famille, même d’une famille aussi surdouée que les D’Addario ! Espérons que cette fratrie- là ne connaîtra pas le destin d’Oasis ou de The Jesus & Mary Chain, le groupe monté ensemble devenant finalement inviable du fait des tensions !
Et d’ailleurs, à ma grande surprise, voilà que les deux frangins échangent leurs rôles : Brian va s’asseoir derrière à la batterie, et Michael prend la guitare et le micro. Et là, le concert change assez radicalement ! Exit la pop merveilleuse, bienvenue au rock couillu et… vulgaire : dans sa tenue léopard ouverte jusqu’en dessous du nombril, Michael nous la joue cette fois comme Pete Townshend : il a le même gros nez, et il effectue les mêmes sauts en l’air à la moindre occasion. Il est d’ailleurs frappant de constater que des morceaux qui, sur l’album, s’intègrent souplement dans une même texture un peu psychédélique, deviennent sur scène des animaux bien différents. Michael a tendance à faire un peu n’importe quoi, braille dans le micro plus qu’à son tour – alors que l’organiste et Brian essaient de tenir la maison du point de vue vocal – et s’amuse surtout à prendre des poses de guitar hero seventies sur le devant de la scène. Musicalement, le set a chuté dramatiquement en qualité, mais ce n’est pas grave, car le niveau d’excitation générale a encore monté, du moins, dans les premiers rangs !
Le set se clôt sur A Great Snake, comme l’album, sauf que Michael a plus tendance à beugler qu’à chanter… Mais The Lemon Twigs reviennent très vite, accompagnés cette fois par leur raod manager qui s’installe derrière la batterie. Michael et Brian entament alors ce qu’ils qualifient de ”tentative” (« pour la première fois, etc. etc. ») : une version de The End, la fabuleuse conclusion de ”Abbey Road”, qui va s’avérer complètement magique. Pour moi, qui en ait les larmes aux yeux, c’est la proverbiale cerise sur le gâteau, d’une soirée qui n’en finit pas d’étonner. Michael fera un dernier tour de piste avec The Queen of My School, une autre nouvelle chanson dans le style ”rock seventies / glam” qu’il affectionne visiblement beaucoup. Rappelons pour le coup que Megan et Danny sont tous deux issus de la même école que les frères D’Addario, ce qui donne à tout cela un air de groupe de lycée vraiment très sympathique…
Complètement sous le charme, je rejoins Clément vers l’arrière de la salle... pour découvrir qu’il avait complètement manqué la première partie du set des frères D’Addario, et qu’il a donc été déçu par la grossièreté du spectacle (sans même mentionner le son pourri…). Bref, cette soirée qui restera pour moi dans les annales n’aura clairement pas été vécue de la même manière par tout le monde ! »
Les musiciens de The Lemon Twigs sur scène :
Brian D’Addario – vocals, guitar, drums
Michael D’Addario – vocals, guitar, drums
Megan Zeankowski- bass
Danny Ayala – keyboards, guitar, vocals
La setlist du concert de The Lemon Twigs :
I Wanna Prove to You (Do Hollywood – 2016)
Haroomata (Do Hollywood – 2016)
Why Didn't You Say That (new song)
Frank (Do Hollywood – 2016)
Love Stepped Out (new song)
These Words (Do Hollywood – 2016)
How Lucky Am I? (Do Hollywood – 2016)
Night Song (new song)
Baby, Baby (Do Hollywood – 2016)
All of the Time (Alex Chilton cover)
As Long as We're Together (Do Hollywood – 2016)
So Fine (new song)
A Great Snake (Do Hollywood – 2016)
Encore:
The End (The Beatles cover)
The Queen of My School (new song)