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Play It Loud !!!! Le rock'n'roll, c'est fait pour la scène...
2 mars 2017

Benjamin Clementine - Mercredi 4 Novembre 2015 - Olympia (Paris)

2015 11 Benjamin Clementine Olympia Billet« Le premier disque de Benjamin Clementine m'a littéralement scotché, au début de cette année. Par son ambition, par son originalité. Par la voix incroyable de ce type hors du commun. Le voir sur scène devenait du coup une vraie priorité pour moi, maintenant que j'étais de retour en France. Sa prestation à Rock en Seine s'est avérée un peu décevante, mais il était largement possible d'attribuer cette déception au décalage patent entre la musique de Clementine et l'ambiance dissipée d'un grand festival en plein air. Ce soir à l'Olympia, une salle à l'ambiance parfaite pour ce genre de set (même si les fantômes ont été bien évidemment enterrés avec les décombres de la "vraie" salle mythique), ce serait clairement "l'acid test" : Clementine, chanteur frimeur qui resterait l'homme d'un seul album (on ne peut pas ne pas penser, dans un registre assez similaire, à l'apparition de Jeff Buckley dans les années 90...), ou bien artiste « profond » destiné à durer ?

2015 11 04 Holly Mckee Olympia (5)J'arrive assez tôt à l'Olympia pour assurer le premier rang, malheureusement un peu sur la gauche... ce qui n'est pas idéal pour photographier un type passant la quasi-totalité de son set assis à son piano et tournant le dos à la gauche de la salle ! Bon, faisons contre "mauvaise fortune" bon cœur : j'ai déjà pu prendre de bonnes photos de lui à Rock en Seine... Autour de moi, je remarque tout de suite que le public est plutôt d'âge moyen (… à élevé) et très "parisien" : pas très rock'n'roll, plutôt variété française même...

A 20 heures pile, une jeune Américaine blonde vêtue de noir, qui se présente comme Holly McKee, ou quelque chose dans le genre (je n’irai pas chercher comment elle s’appelle : une pure perte de temps !), entame en acoustique une suite mortifère de chansons country immobiles. Ennui profond, incommensurable même. Si la voix est techniquement impeccable - dans le registre country donc -, les morceaux, tous lents, tous semblables, tous interminables, réussissent à être à la fois vides, insipides et laids. Consternant ! Elle s'en va au bout d'une demi-heure sur un Sycamore Tree encore pire que le reste. Quand je pense que le public, poli comme tout, applaudit !

20h55 : la scène est plongée dans le noir, avec juste un spot blanc au-dessus du grand piano à queue, devant lequel est placé un haut tabouret de bar. Benjamin Clementine s'appuie contre le tabouret, et commence son "récital" en solo. Il porte son habituel long manteau bleu, et est pieds nus. Dès la petite intro fantaisiste qu'il nous offre, avant d'enchaîner sur le puissant Condolences, sa voix est impressionnante, contrastant avec une présence scénique toute de douceur. La majorité de la set list de ce soir sera composée de chansons lentes, et Benjamin s'en excusera plus tard à demi-mots. Benjamin sera rejoint tour à tour par e batteur percussionniste qui avait déjà fait son show à Rock en Seine, et par la violoncelliste... qui offrira au public de l'Olympia son premier vrai grand plaisir avec ses riffs menaçants sur Nemesis.

2015 11 04 Benjamin Clementine Olympia (9)Peu de changements dans l'ambiance durant toute l'heure que durera le set : pas beaucoup de lumière, une interprétation apaisée de quelques chansons connues au milieu de pas mal de morceaux que je découvrais, un dialogue régulier - dans un français qui s'améliorera au fil de la soirée  ("c'est génial !") - entre Benjamin et son public, particulièrement généreux. Même quand Benjamin ne dit rien de drôle, tout le monde s'esclaffe, on est à la limite du léchage de cul (ou plus poliment, de la complaisance), mes amis !... Et moi ça m'énerve passablement, cette espèce de fausse complicité que le public manifeste...

Je me rends compte peu à peu que ce qui pèche avec Benjamin Clementine, c’est qu’il dédramatise en permanence son Art, en en gommant les aspérités (qui figurent sur l’album), qu’il interprète ses chansons avec une distance ironique, « tongue-in-cheek », très british, qui les déleste largement de leur potentiel émotionnel – pourtant énorme… Son truc, finalement, c’est le cabotinage, les clins d’œil au public : je vous « joue » les personnages qui peuplent mes chansons, et je vous fais bien voir que ce n’est qu’un jeu. Du coup, quand le piano classique, facilement grandiose, et la voix inouïe devraient élever l’émotion vers une intensité hors du commun, on est plutôt dans « l’understatement », et la musique bien lisse, qui ne risque pas d’enflammer les cœurs, mais ne choquera personne. Je fais mentalement la comparaison avec un Neil Hannon, au positionnement pas si différent, c’est-à-dire composer des mini symphonies extatiques, et les dynamiter par l’humour : Neil met en scène ses propres doutes par rapport aux ambitions de sa musique dans ses commentaires entre les morceaux, joués quant eux avec tout son cœur et toute son âme. Benjamin, lui, se plaît sur scène à injecter du doute et de la retenue dans sa musique même, comme s’il avait peur que libérer ses émotions témoigne d’un manque d’intelligence. De ce fait, on a affaire au final à un concert en demi-teinte, plutôt qu’au déferlement furieux que ses compositions appellent…

Le rappel commence par un solo de batterie... raaaah… déstructuré, manquant de puissance… pénible... ! Avant un morceau – Beady Buses ? -  qui injecte enfin dans le set un peu de bizarrerie bien venue. On finit avec une version soft de London, qui reste tout de même une vraie grande et belle chanson. Le trio salue, et disparaît...

2015 11 04 Benjamin Clementine Olympia (40)… Le public ne l'entend pas sur ce ton, et Benjamin revient pour un second rappel qui semble impromptu, puisque Benjamin est "en civil", en simple chemise blanche sur pantalon noir (et toujours pieds nus). Il se lance dans une chanson en français, mais il nous faut un moment pour reconnaître… Emmenez-moi ! Tout le monde - sauf moi, vous vous en doutez - reprend en chœur la scie d'Aznavour... Ça me fait quand même un peu flipper d'être là entouré de Parisiens bien mis qui répètent, un grand sourire aux lèvres, que "la misère serait moins pénible au soleil" (dites donc ça aux réfugiés syriens, vous verrez ce qu'ils vous répondront...). Benjamin se saisit de cette fameuse phrase du refrain, la répète jusqu’à l’usure, la vide de sa substance par l’épuisement humoristique, par le jeu qui s’établit entre lui et le public qui lui fait écho : encore une fois, il préfère la caricature souriante au déferlement de pathos. Pour le coup, je lui en suis reconnaissant (je hais ce genre de variété française aux sentiments grossiers)…

Bon, trêve de mauvais esprit de ma part, Benjamin paraît vraiment très ému à la fin du rappel, et il a du mal à s'arracher à ce moment certainement important pour lui, dans une salle aussi mythique que l'Olympia.

C’est fini, il ne me reste plus qu'à faire 20 minutes de queue pour récupérer mon vestiaire : il y a des choses qui ne changent pas avec les années...

Alors, le futur de Benjamin Clementine ? Eh bien, malgré quelques moments d'excellence au cours de ce concert très intimiste, plus convaincant certes que celui de Rock en Seine (ce n'était pas difficile…), on ne peut rien garantir. Aucune des chansons nouvelles - ou tout au moins inconnues de moi - n'a la force des compositions de l'album, et le refus de donner de la puissance aux morceaux les plus connus s’est avéré frustrant à la longue.

L’épuisement, déjà ? »

Ce compte-rendu a déjà été partiellement publié sur mon blog manitasdeplata.net

Commentaires
Play It Loud !!!! Le rock'n'roll, c'est fait pour la scène...
  • Depuis que j'ai 15 ans, ce qui nous fait un bail, je fréquente les salles de concert de par le monde, au gré de mon lieu de résidence. Il était temps de capturer quelque part tous ces grands et petits moments d'émotion, de rage, de déception, de plaisir...
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