Yeah Yeah Yeahs - Jeudi 30 Avril 2009 - Bataclan (Paris)
« Je dois dire que j'aime bien aller à un concert "sans pression", c'est-à-dire sans aucune attente particulière, sans enjeu, comme s'il ne s'agissait pas de la chose de la plus importante de la planète (le rock'n'roll, qui définit plus ou moins nos vies, non ?), mais d'un simple divertissement anodin. Bref, je me suis pointé au Bataclan sold out pour les Yeah Yeah Yeahs tout-à-fait décontracté, un peu comme d'aucuns vont voir une pièce de théâtre de boulevard, ou d'autres un film avec Audrey Toutou ou Dany Boon, le genre. Il faut dire que Yeah Yeah Yeahs, passé un premier disque ébouriffant, n'a pas fait grand chose pour nous intéresser, et les commentaires sur le nouvel album sont tellement tiédasses que je me suis mis à bâiller simplement à regarder la pochette sur Amazon, ce qui fait que je n'ai pas cliqué sur "ajouter à votre panier"...
Bon, le printemps est là sur le boulevard, les (jeunes) spectateurs et -trices sont remuants comme il faut, et notre petite bande à géométrie variable de bonne humeur, alors que les vannes volent bas sur les goûts musicaux des uns et des autres.
Les deux musicos de HTRK (Haute Tension Rouge Képi?) commencent par bidouiller accroupis dans le noir, ce qui n'est pas la manière la plus sexy et spectaculaire de commencer un set. Ils sont heureusement rejoints par une belle plante brune, qui a le bon goût de porter un costar blanc assez classe, à même la peau. La musique lancinante qui s'élève, entre boucles de guitare crissante et basse lourde et grondante, est assez intrigante, voire fascinante, il faut bien le dire. La voix de la chanteuse de HTRK (Hâte Tragique Ridiculise les Kilts), malheureusement, n'a pas l'ampleur gothique de celle d'une Nico ou d'une Siouxsie, qui serait nécessaire à illuminer ce genre de messe sombre. On attend l'explosion, la libération des sens, d'autant que le niveau sonore, relativement correct (je veux dire élevé, bien entendu) se prêterait bien à un tourbillon bruitiste. Mais rien : morceau après morceau, le rythme lugubre de la main qui s'abat sur la grosse caisse ne varie pas, et l'intérêt s'engloutit peu à peu dans un engourdissement d'abord plaisant, puis assez frustrant. Dommage ! Il y avait dans l'extrémisme provocateur de HTRK (Hot Truck Road Kill ?) de quoi générer un peu d'une rage qui aurait été bien venue (voir les réactions des adolescentes à mes côtés qui s'indignaient de l'attitude d'artistes qui ne souriaient ni ne parlaient ! Comme quoi, la notion de spectacle de la télé sarkozienne s'impose peu à peu : il faudrait forcément plaire pour exister !?). Mais bon, tout cela n'est en définitive qu'un ratage de plus, malheureusement...
J'aimais bien Karen O à ses débuts, en 2003, quand elle avait cette espèce de crudité assez sale de hardeuse, ces gestes incontrôlés et souvent grotesques qui allaient si bien avec les brisures électriques de la musique des Yeah Yeah Yeahs, et je me rends compte que je suis finalement assez curieux de voir comment elle a... mûri. Son entrée en scène est assez jolie, car dans le noir - qui prédominera largement sur scène (sous le regard d'un globe oculaire illuminé qui se transformera en lune, puis en globe terrestre...) -, Karen s'est entouré la tête, visage compris, d'une sorte de tube fluorescent rose du plus bel effet. Ce sera malheureusement la seule occasion de la soirée de "voyager" un peu (propos judicieux entendu sur le quai du métro Oberkampf à la sortie...), car pour le reste, le professionnalisme venu aux Yeah Yeah Yeahs, Karen s'est révélé ce qu'elle a sans doute toujours été : une nana assez quelconque, frôlant régulièrement la laideur même, ne sachant ni bouger ni même mimer la moindre excitation rock'n'rollienne. Reste à admirer l'inventivité - assez plouc quand même - de ses fameuses tenues, en fait plutôt drôles à force d'être moches. Mais bon, la musique, me direz-vous ? La musique ? Bof, on a oscillé ce soir entre morceaux planants insignifiants virant hard (heureusement, beaucoup moins de synthétiseurs que sur l'album, paraît-il...), petites pointes aiguës d'excitation - surtout les deux dernières minutes du rappel au bout d'une courte heure qui m'a paru, avouons-le, bien plus longue -, et plages interminables que l'on qualifiera gentiment d'insignifiantes. Bref, Yeah Yeah Yeahs est un groupe qui, passé la hype de sa découverte, n'a pas grand chose à nous proposer, en dehors du look de ses musiciens : Nick le guitariste à jamais nostalgique de Jesus & Mary Chain (on le comprend), et Brian l'archétype du new yorkais sympathique / slacker à la batterie (plus un musicien additionnel apportant un peu de force et de profondeur à certains moments...). Ajoutons que les lumières étaient conçues pour empêcher les photos (c'était de bonne guerre, c'est Nick qui a pris des photos de nous !), que le son était bon mais insuffisant, bien en dessous en tout cas du niveau du premier groupe, et que les canons à confetti (en forme de "Y", classe !) ont abondamment essayé de conférer un air festif à un concert qui n'avait rien de festif, justement... Et que la soirée m'a été partiellement gâchée par une Américaine qui a tapé l'incruste au premier rang sans aucune vergogne, en faisant croire au videur qu'elle allait s'évanouir au milieu du public, et qui n'a pas arrêté ensuite de jacasser. Bon, on sait que c'est ça aussi, "l'enfer des concerts", cette occasion toujours renouvelée de constater la médiocrité de l'humanité : comme quoi, je le répète, le rock'n'roll, c'est bien la meilleure leçon de vie qui soit ! Ouais Ouais Ouais ! »
La setlist du concert de Yeah Yeah Yeahs :
Heads Will Roll (It’s Blitz - 2009)
Rockers To Swallow (EP - 2006)
Dull Life (It’s Blitz - 2009)
Gold Lion (Show Your Bones - 2006)
Black Tongue (Fever To Tell - 2003)
Honey Bear (Show Your Bones - 2006)
Cheated Hearts (Show Your Bones - 2006)
Skeletons (It’s Blitz - 2009)
Soft Shock (It’s Blitz - 2009)
Down Boy (B Side - 2007)
Zero (It’s Blitz - 2009)
Y Control (Fever To Tell - 2003)
Encore:
Maps (Fever To Tell - 2003)
Date With The Night (Fever To Tell - 2003)